
L’allergie aux protéines du lait de vache (APLV) est la première allergie alimentaire pouvant apparaître chez l’enfant. En effet, elle débute le plus souvent au cours des premiers mois de vie. Saviez-vous qu’en France, on estime à environ 3 % le nombre d’enfants atteints d’APLV ? Ce chiffre est probablement surestimé, car cette allergie est souvent confondue avec l’intolérance au lactose, qui n’est pas une allergie, mais un déficit en une enzyme indispensable à la digestion du lactose : la lactase.
Le point sur cette APLV avec Sandrine, votre pharmacienne conseil DocMorris pour détecter l’APLV précocement, adapter l’alimentation et l’environnement de l’enfant, tout en maintenant une croissance harmonieuse et en rassurant les parents.
Qu’est-ce que l’APLV ?
L’allergie aux protéines de lait de vache (APLV) est une réaction anormale du système immunitaire du nouveau-né à l’ingestion de protéines présentes dans le lait de vache, ce qui peut provoquer différents symptômes. Même si le système immunitaire du bébé est immature à la naissance, ce type de réaction allergique peut se produire dès les premières semaines de vie. Il est essentiel de ne pas confondre allergie et intolérance.
Différence entre allergie et intolérance
L’allergie est une réaction immunitaire impliquant des anticorps — nos soldats de défense — et notamment des anticorps spécifiques appelés IgE, présents dans les réactions allergiques comme l’APLV. Elle peut entraîner des symptômes immédiats (urticaire, œdème, vomissements) ou retardés (eczéma, diarrhées).
L’intolérance, quant à elle, n’est pas une allergie : elle résulte d’une difficulté à digérer certains composants du lait, notamment le lactose, sans provoquer de réponse immunitaire. Elle est généralement due à l’absence d’une enzyme appelée lactase. Cette intolérance, rare chez les bébés allaités, apparaît plutôt à partir de 5 ans et est très rare avant 3 ans.
Pourquoi elle touche surtout les bébés ?
Le système digestif et immunitaire du nourrisson est encore immature, mais la perméabilité intestinale est plus élevée, ce qui facilite le passage de protéines étrangères dans le sang, provoquant ainsi une réponse allergique. L’exposition précoce au lait de vache, particulièrement via des préparations infantiles pour nourrir bébé (lait en poudre par exemple), peut jouer un rôle.
Quels sont les symptômes les plus fréquents de l’APLV ?
Les signes cliniques de l’APLV sont variés et souvent non spécifiques, ce qui peut compliquer le diagnostic. Ils apparaissent habituellement dans les premiers mois de vie, parfois dès l’introduction des premiers biberons.
Les symptômes observés sont principalement :
Symptômes digestifs
Régurgitations, vomissements,
Diarrhée chronique ou présence de sang dans les selles,
Ballonnements, douleurs abdominales.
Symptômes cutanés
Eczéma, urticaire,
Rougeurs péri-orales (autour de la bouche).
Symptômes respiratoires
Rhinites, toux chronique,
Sifflements respiratoires.
Symptômes généraux
Irritabilité, pleurs excessifs,
Retard de croissance ou cassure de la courbe de poids.
Attention, il est important de noter que tous ces symptômes ne sont pas spécifiques à l’APLV et que dans tous les cas, une évaluation médicale est indispensable.
Comment poser un diagnostic fiable de l’APLV ?
Le diagnostic de l’APLV ne peut être établi que par un médecin ou un pédiatre, sur la base d’un entretien médical approfondi et d’examens ciblés.
Étapes du diagnostic
Interrogatoire clinique : fréquence des symptômes, contexte alimentaire, antécédents familiaux d’allergie.
Test d’éviction-réintroduction : suppression du lait de vache pendant 2 à 4 semaines, puis réintroduction sous contrôle médical pour observer une éventuelle réapparition des symptômes.
Tests cutanés et prise de sang : pour rechercher les anticorps particuliers de type IgE spécifiques.
Test de provocation orale : réalisé en milieu hospitalier, c’est le test de référence.
Il est fortement déconseillé de faire un régime d’éviction sans avis médical, au risque de carences nutritionnelles chez l’enfant. Parlez-en toujours avec un médecin ou un pédiatre.

Quelles alternatives au lait de vache ?
Si le diagnostic d’allergie aux protéines de lait de vache est confirmé, l’éviction stricte du lait de vache et de ses dérivés est alors indispensable. Heureusement, les marques de nutrition infantiles ont développé un certain nombre de références à la disposition des parents qui ne contiennent pas de protéines de lait de vache.
Hydrolysats de protéines de lait : c’est-à-dire que la structure protéique des molécules de lait de vache est fragmentée pour la rendre moins allergisante.
Formules à base d’acides aminés libres : utilisées dans les formes sévères ou si l’hydrolysat est mal toléré.
Laits à base de protéines de riz hydrolysées : une alternative végétale adaptée à certains nourrissons.
Ces laits sont disponibles en pharmacie et partiellement remboursés sur prescription médicale.
Risques des "laits végétaux maison"
Les laits végétaux faits "maison" (riz, amande, avoine…) sont à proscrire chez le nourrisson. Ils sont pauvres en protéines, calcium, acides gras essentiels, et inadaptés à la croissance. De plus, ils ne répondent pas aux critères de sécurité nutritionnelle exigés pour les bébés.
Conseils pratiques au quotidien
Au quotidien, gérer une allergie aux protéines de lait de vache demande vigilance et organisation.
Lecture des étiquettes alimentaires
Il faut scruter attentivement les étiquettes à la recherche de mentions comme :
Lait, lactosérum, caséine, caséinate,
Beurre, crème, fromage, yaourt,
Protéines de lait, poudre de lait.
Attention : les produits « sans lactose » ne sont pas forcément sans protéines de lait !
Précautions à la crèche ou chez la nounou
Il s’agira d’informer clairement l’entourage de l’enfant, pour cela, il peut être nécessaire de :
Fournir un certificat médical,
Préparer ou fournir des repas et laits spécifiques,
Prévenir les risques de contamination croisée,
Connaître les ingrédients cachés contenant du lait.
Ingrédients cachés à surveiller
Certains ingrédients dérivés du lait peuvent être trompeurs, il s’agit notamment de molécules comme la lactoglobuline, la lactalbumine, des arômes naturels souvent à base de lait. Attention également aux margarines (vérifier qu’elles sont bien 100 % végétales). Des sites et applications spécialisés peuvent vous aider à identifier les produits sûrs.
L’APLV disparait-elle avec l’âge ?
C’est la bonne nouvelle, car heureusement, l’APLV est souvent transitoire et va effectivement disparaitre avec l’âge. En effet, on estime que :
50 % des enfants tolèrent à nouveau le lait à 1 an,
75 % à 3 ans,
90 % à 6 ans.
Une réintroduction progressive sous surveillance médicale est recommandée, en suivant généralement un protocole d’oral tolérance induction bien expliqué aux parents.
L’APLV est une allergie fréquente chez le nourrisson. Elle est fréquemment transitoire, mais nécessite une prise en charge rigoureuse. Grâce à une alimentation adaptée et à un bon accompagnement, les enfants atteints d’APLV peuvent grandir en pleine santé. Le pharmacien joue un rôle clé pour aider les parents à choisir un lait adapté, comprendre les étiquetages, rassurer sur la croissance de l’enfant et orienter vers un allergologue si nécessaire.