Focus sur le diabète gestationnel

Écrit par Sandrine Nail-Billaud le 13/11/2022

Femme enceinte prenant un goûter

Saviez-vous qu’une future maman pouvait développer un diabète durant la grossesse ? La grossesse est le moment où l’on aime les plaisirs sucrés, mais ces envies peuvent parfois être freinées par la découverte d’une glycémie un peu trop élevée. Transitoire et non rare, puisqu’il touche 8 à 10% des femmes enceintes en France, le diabète gestationnel apparaît au cours de la grossesse pour ensuite disparaître après l’accouchement.
Comment expliquer le diabète gestationnel et le dépister ? Quels sont les potentiels risques pour la maman et le bébé ? Comment le traiter pendant la grossesse et après ? Votre pharmacien conseil DocMorris fait le point sur cette pathologie propre à l’état de grossesse, dont la prise en charge est bien maîtrisée.

Qu’est-ce que le diabète gestationnel et ses conséquences ?

Le diabète gestationnel, ou diabète de grossesse, est diagnostiqué chez une femme enceinte. Il s’agit d’un trouble de la tolérance au sucre avec augmentation de la glycémie (quantité de sucre dans le sang) plus ou moins importante. Cette anomalie de la tolérance au sucre est transitoire : elle apparaît pendant la grossesse et disparaît après l'accouchement.

Sous le terme de diabète gestationnel, on regroupe deux populations différentes :

  • Les femmes qui ont un diabète méconnu et que la grossesse va révéler.

  • Les femmes qui développent un diabète uniquement à l’occasion de la grossesse, trouble qui disparaît le plus souvent après la grossesse.

L’apparition de ce diabète gestationnel est liée aux nombreuses modifications hormonales qui se produisent au cours de la grossesse et notamment lors de la seconde partie de grossesse. En effet, le diabète de grossesse peut se manifester entre la 24ᵉ et la 28ᵉ semaine de grossesse, au moment où il est nécessaire de produire davantage d’insuline (hormone permettant de réguler le glucose dans le sang). Si le pancréas ne parvient pas à en produire suffisamment pour maintenir une glycémie normale, cela entraîne une hyperglycémie. Le glucose qui s'accumule dans la circulation sanguine de la mère traverse alors le placenta, provoquant des complications à la fois pour la maman et pour le bébé.

Les conséquences du diabète gestationnel chez la femme enceinte

La maman risque une hypertension artérielle gravidique et une pré-éclampsie, une pathologie associant une hypertension artérielle avec la présence de protéines dans les urines, cas d’urgence pouvant mettre en jeu le pronostic vital du bébé.

Le diabète gestationnel augmente également le risque de complications comme :

  • un décollement du placenta,

  • des troubles de la coagulation,

  • une insuffisance rénale,

  • un accouchement prématuré.

Rassurez-vous, en cas de diabète gestationnel équilibré, l'accouchement se déroule normalement. Dans le cas contraire, si le fœtus risque des complications, l'accouchement est provoqué avant le terme, souvent par césarienne, surtout si le poids du bébé est estimé à plus de 4,2 kg.

Les conséquences du diabète gestationnel chez le bébé

Pour le bébé, il existe un risque de macrosomie. Cela signifie qu'il encourt une prise de poids plus importante que la norme, au-delà de 4 kg pour un bébé né à terme. Il peut aussi être sujet à l'hypoglycémie. Enfin, l’enfant présente un risque plus élevé d'être atteint de diabète de type 2 au cours de sa vie. L'accouchement peut être plus difficile au regard du poids du nouveau-né, entraînant l'utilisation des techniques instrumentales comme la ventouse et les forceps ou encore les spatules. Le diabète gestationnel peut provoquer, après l'accouchement, une détresse respiratoire par manque de maturation des poumons, une jaunisse ou encore un manque de calcium dans le sang.

Quels sont les facteurs de risque de développer un diabète de grossesse ?

Le mode de vie de la future maman a un impact sur le diabète de grossesse. De fait, le surpoids et l’obésité de la femme avant la grossesse représentent le facteur de risque le plus fréquent. Il se traduit par un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 25 kg/m2. L'origine ethnique entre également en jeu, puisque les femmes originaires d'Afrique subsaharienne, d'Asie et du Maghreb présentent davantage de risques que les femmes européennes. Le surpoids est souvent accompagné d’un manque d’activité physique et d’une augmentation de la sédentarité, ce qui aggrave la prise de poids.

À partir de 35 ans, le risque de développer un diabète gestationnel est aussi plus important, car le corps connaît plus ou moins un ralentissement en termes de production d’hormones. Une précédente grossesse avec diabète gestationnel accentue les risques pour une autre grossesse, tout comme un antécédent d'accouchement d'un bébé de plus de 4 kg né à terme. Par ailleurs, le syndrome des ovaires polykystiques ou SOPK provoque chez les femmes qui en sont atteintes des troubles métaboliques comme une adiposité excessive qui favorise la résistance à l'insuline et le développement d’un diabète au cours de la grossesse.

Comment faire le diagnostic du diabète gestationnel ?

Il faut savoir que la recherche du glucose dans les urines est faite de manière systématique au cours de la grossesse au moment des consultations de suivi, c'est-à-dire tous les mois. Cette recherche est réalisée par une bandelette urinaire, si celle-ci est positive, un dosage précis du glucose présent dans les urines est alors effectué.

Au cours de la grossesse, entre la 24ᵉ et 28ᵉ semaine de grossesse, est prévu un dépistage plus ciblé du diabète gestationnel avec une épreuve appelée HGPO, pour Hyperglycémie Provoquée par Voie Orale. Elle consiste en une absorption standard de 75g de glucose et le dépistage s’effectue en réalisant un dosage de la glycémie 1h, puis 2h après l’ingestion de ces 75g de manière à vérifier que tout redevient normal dans les temps. Si une valeur de la glycémie est supérieure à celles qui sont dans le tableau suivant, alors le diagnostic de diabète gestationnel sera posé.

Seuil

Avant consommation de 75g de glucose

0.92g/L

1h après consommation de 75g de glucose

1.80 g/L

2h après consommation de 75g de glucose

1.53 g/L

Comment surveiller et traiter le diabète au cours de la grossesse ?

Les clefs d'un traitement réussi s'appuient sur un dispositif qui comprend :

  • la motivation de la patiente,

  • son autosurveillance glycémique,

  • des mesures hygiéno-diététiques,

  • une équipe pluridisciplinaire de médecins qui suivent l’évolution de la patiente et de son diabète (médecin généraliste, gynécologue, nutritionniste, diabétologue...).

Autosurveillance glycémique

La femme enceinte doit pratiquer l’autosurveillance glycémique, 4 à 6 fois par jour dans le but de garder une glycémie à un taux acceptable, soit inférieur ou égal à 0.95g/L à jeun et inférieur à 1,20g/L deux heures après le début du repas. Ces résultats déterminent la prescription d’un traitement par insuline.

Prise en charge diététique

Le premier traitement est la prise en charge diététique avec un régime alimentaire adapté et un contrôle du poids :

  • Privilégiez les aliments à faible index glycémique qui font peu monter la glycémie, en suivant un régime hypoglucidique.

  • Répartissez la prise des glucides au cours de la journée en repas fractionnés (3 repas, 2 collations). Un professionnel de santé vous orientera en fonction du calcul de la ration calorique adaptée à chaque femme.

  • Privilégiez les fibres, elles ralentissent l’absorption des glucides et donc le pic d’hyperglycémie post-prandiale.

Activité physique

En dehors de contre-indications médicales, l’activité physique régulière et appropriée au profil de la femme enceinte est recommandée dans le cas d’un diabète gestationnel temporaire ou d’une grossesse avec un diabète.

Traitement par insuline

L'insuline est réservée aux femmes pour qui les mesures hygiéno-diététiques ne suffisent pas pour atteindre l’équilibre glycémique. Des injections d’insuline rapide de type “analogues rapides” peuvent être prescrites, de même que des insulines lentes si nécessaire. Les antidiabétiques oraux sont contre-indiqués pour la femme enceinte.

Que se passe-t-il après la naissance ?

Après l'accouchement, la mère ayant eu un diabète gestationnel ainsi que son bébé sont attentivement suivis. Cette surveillance est prolongée dans le temps.

La surveillance de la maman après un diabète de grossesse

Pour les femmes qui n'ont pas eu de traitement par insuline, la glycémie revient à la normale, et tout rentre dans l’ordre peu après l’accouchement. Le risque de développer un diabète de type 2 existant, il est fortement conseillé d’effectuer un dépistage périodique, de contrôler son poids et de pratiquer une activité physique régulière.

Pour les femmes ayant suivi un traitement, celui-ci sera stoppé et un contrôle régulier en post-partum réalisé. Il sera nécessaire d'effectuer un dépistage du diabète par dosage de glycémie à jeun ou par HGPO, entre la 6ᵉ et la 8ᵉ semaine après l'accouchement, puis 3 mois après, puis tous les 1 à 3 ans selon les facteurs de risque pendant au moins 25 ans. Il faudra bien sûr assurer un suivi pour toute nouvelle grossesse.

À savoir que 50% des femmes qui ont connu un diabète gestationnel souffriront d'un diabète de type 2 au cours de leur vie, notamment en cas d'obésité ou de surpoids.

La surveillance du nouveau-né

Durant les premiers jours de sa vie, le nouveau-né, encore incapable de réguler son taux de sucre dans le sang, risque une hypoglycémie. Afin de contrôler sa glycémie, des prélèvements d'une goutte de sang sur une bandelette sont effectués. Ces anomalies peuvent être corrigées par une alimentation précoce et rapprochée. Pour cette raison, l'enfant est nourri le plus tôt possible après la naissance, puis à intervalles rapprochés de 2 à 3 heures maximum.

L’enfant, né d'une mère ayant présenté un diabète gestationnel, présente davantage de risque de développer des complications métaboliques à long terme comme un diabète modéré durant l'adolescence et même à l'âge adulte. Il sera donc important que le médecin traitant effectue un suivi afin de détecter la survenue d'un surpoids en contrôlant la courbe de corpulence et d'encourager l'enfant à adopter de bonnes habitudes alimentaires accompagnées d’une activité physique régulière.

Enfin, si le diabète gestationnel peut présenter des symptômes similaires à ceux des autres types de diabète tels qu'une soif excessive ou fatigue importante, mictions fréquentes et abondantes, …. il peut aussi passer complètement inaperçu en étant asymptomatique, c'est-à-dire sans symptômes. Comportant un risque pour la mère comme pour l’enfant, le diabète gestationnel doit être surveillé et traité. Un traitement hygiéno-diététique strict, voire médicamenteux (insuline), du diabète de grossesse est alors nécessaire, sans oublier une surveillance de la glycémie. La prévention reste donc de mise pour anticiper l’apparition et l’évolution d’un diabète gestationnel, la maman et l’enfant soumis à un potentiel risque lorsqu’il apparaît de développer un diabète chronique par la suite. Pour toute question, n’hésitez pas à solliciter votre médecin et/ou pharmacien.